En 2050, un Français sur trois aura plus de soixante ans. Les enjeux pour la société que suppose l’avancée en âge de la population doivent être largement débattus. La gauche et la droite ont ici des visions divergentes.

Dans son programme de 2007, Nicolas Sarkozy promettait une grande réforme de la dépendance à travers la création d’un cinquième risque de la sécurité sociale « dès 2009 ». Promesse réitérée à plusieurs reprises durant son quinquennat pour finalement rester lettre morte jusqu’en 2012. Aujourd’hui, ses prises de position pointent à nouveau son manque d’ambition et de vision pour ce sujet essentiel pour les personnes âgées, leur famille, et l’avenir de notre pays.

« Le gouvernement a tenu ses engagements »

Lors de l’université d’été des Républicains à la Baule, Monsieur Sarkozy s’est lancé dimanche dernier dans un discours qui pourrait se résumer par « on a abandonné les personnes âgées et leurs familles ».

S’agissant de lui, entre 2007 et 2012, cela ne fait aucun doute.

Il en est tout autrement des quatre millions d’aidants qui prennent soin de leurs aînés ; de l’ensemble des bénévoles et des professionnels mobilisés au quotidien; de l’ensemble des collectivités, de leurs agents et de leurs élus qui ont à cœur de développer et de mettre en place des politiques publiques solidaires ambitieuses.

Le gouvernement a tenu ses engagements face à ce défi de taille. La loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement et sa mise œuvre est en cours.

C’est plus d’un demi-milliard qui est débloqué par an pour la revalorisation (de 13%) de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), pour l’augmentation des salaires de la branche d’aide à domicile, ainsi que pour le « droit au répit » à destination des aidants.

C’est la première fois dans le droit français que les aidants sont reconnus. Il s’agit en l’occurrence d’un soutien permettant par exemple de financer une semaine d’aide à domicile pour permettre à la personne aidante de prendre du repos.

La loi met à disposition de nombreux outils entièrement financés. Ils doivent maintenant être appliqués par tous les départements.

Je n’ai pas entendu Monsieur Sarkozy rappeler à l’ordre les quelques présidents de conseils départementaux de sa formation politique qui ne mettent pas en œuvre sur le territoire cette loi. Dans ces départements des bénéficiaires de l’APA se voient diminuer leurs nombre d’heures d’aide à domicile quand on ne leur supprime pas tout simplement.

Alors, quelles sont ses propositions ?

Son dernier ouvrage Tout pour la France aborde « la redoutable problématique de la dépendance et du grand âge ». Dans un exposé sommaire, il fait des propositions qui renforcent encore plus l’inquiétude que l’on peut avoir à leurs lectures.

Il propose de « créer une aide à l’hébergement pour les personnes âgées dépendantes en maison de retraite, récupérable sur les successions, dont le niveau varierait en fonction des revenus ». Suit « un grand plan de création de places en maisons de retraites », qui, « nous conduira à la création d’un véritable cinquième risque au sein de la sécurité sociale ».

Monsieur Sarkozy propose tout simplement, dans le cas de figure d’un hébergement en maison de retraite, de récupérer tout ou partie de l’héritage pour son financement.

« Notre histoire de l’aide sociale, se voit mise à mal »

Et que propose-t-il pour nos concitoyens qui n’ont pas de patrimoine ? Ils sont nombreux et les principes d’égalité comme de justice sociale commandent qu’ils ne soient pas laissés de côté.

La philosophie qui a présidé à la création de l’APA le 1er janvier 2002 sous l’impulsion de Lionel Jospin et Paulette Guinchard-Kunstler, était justement de ne pas inscrire cette prestation dans une logique aux effets pervers. En effet, la récupération sur succession peut conduire les personnes les plus modestes à renoncer à une aide sociale pour ne pas entamer l’héritage qu’elles souhaitent léguer à leurs proches et à abandonner à leurs sorts celles et ceux qui n’ont aucun patrimoine.

Notre histoire de l’aide sociale, se voit mise à mal avec un retour aux principes les plus libéraux du XIXème siècle.

Monsieur Sarkozy pourrait d’ailleurs reprendre à son compte une des formules de Malthus, « au grand banquet de la nature il n’y a pas de couvert vacant pour les pauvres », en remplaçant simplement le mot « nature » par « Etat ».

Par cette logique, il appelle de ses vœux l’affaiblissement des mécanismes de solidarité nationale qui affectera la cohésion nationale.

La question du domicile quant à elle est délaissée et abordée sommairement puisqu’il se cantonne à proposer la suppression des cotisations sociales sur les emplois familiaux (garde d’enfants, aide-ménagère, aide aux personnes âgées ou en situation de handicap). Notons que le gouvernement a mis en place la réduction des cotisations dues à partir du 1er décembre 2015 pour les emplois familiaux. Ce dispositif a été pensé pour inciter notamment les particuliers à embaucher et à déclarer les heures des personnes qu’ils emploient à domicile pour mieux lutter contre le travail dissimulé.

Monsieur Sarkozy veut faire du « placement » en maison de retraite la règle. Dont acte. Mais il oublie alors la grande majorité des personnes qui aspire à poursuivre leur vie à domicile (81% selon une étude Ifop de 2010). C’est la raison pour laquelle nous avons placé la question de l’aide à domicile au cœur de la loi d’adaptation de la société au vieillissement.

Partir des demandes, des besoins et y répondre est notre ambition. D’autant plus que selon les projections démographiques 300 000 emplois non délocalisables peuvent être créés.

En définitive, Monsieur Sarkozy propose de briser la solidarité nationale, d’organiser le désengagement public avec des mesures inadaptées et socialement injustes, qui se résument en une phrase : l’abandon des personnes âgées et de leurs familles.

Si nous voulons être à la hauteur des défis tout en respectant le sérieux budgétaire, le débat démocratique doit se concentrer sur la manière dont on doit garantir les droits existants et pourquoi pas en créer d’autres. C’est ce que nous faisons depuis 2012.

Source : http://www.huffingtonpost.fr/pascale-boistard/vieillissement-sarkozy-propositions_b_11924774.html

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